Repousser les barbares : le mur d’Hadrien

Hadrian's_wall2Au début du IIe siècle après JC, l’empire romain connaît son apogée : chômage faible, taux de croissance élevé, déficit public inférieur à 3%… Grâce à une politique de modération salariale, son économie est très compétitive, ce qui lui permet de prendre de nombreuses parts de marché à l’export. Mais cette prospérité insolente a une contrepartie : c’est l’immigration massive et subie de barbares métèques.

En effet, de nombreux étrangers fuyant la misère des vertes forêts germaniques ou des déserts sans fin du Sahara migrent vers l’Empire romain alors qu’on ne leur avait rien demandé. Leur motivation : les salaires élevés et le système social romain généreux dont ils comptent bien profiter. Au départ le déplacement de populations vers l’Italie est limité, seuls quelques jeunes hommes s’installent dans le Latium pour former une main-d’œuvre bon marché exploitée par les propriétaires fonciers romains. Mais très vite la pression migratoire s’amplifie et devient massive : on parle alors de vague migratoire.

Alors l’identité nationale romaine est menacée, puisque la culture des barbares est incompatible avec la culture romaine, supérieure et raffinée. Prenons l’exemple des Pictes, l’équivalent actuel des Écossais. Alors que pour les Romains il n’existe aucune séparation possible entre le politique et le religieux (l’empereur est divinisé lors de l’apothéose), les Pictes sont fermement convaincus du contraire, puisqu’ils séparent strictement le rôle de prêtre et celui de chef. On voit bien que nos ancêtres, les cultivés Romains, devaient faire face à la menace de peuples primitifs et barbares incapables de s’intégrer. Et en plus ils ne faisaient aucun effort pour parler latin, c’était une vraie violence symbolique quotidienne à l’encontre des citoyens romains.

Cela oblige les autorités à prendre la seule mesure possible : construire des murs autour de l’Empire. Étudions le cas du mur d’Hadrien. Situé à la limite entre l’Angleterre et l’Écosse, il a pour but d’éviter que les barbares du Nord de l’île ne s’installent dans le Sud de l’Angleterre et viennent troubler la vie paisible des citoyens romains, ou anglais, je ne suis plus très sûr de savoir qui est civilisé et qui est barbare. Bref ça marche du tonnerre, on fait patrouiller des auxiliaires (c’est-à-dire des étrangers) le long du mur pour éviter les migrations des étrangers venus du Nord, protégeant ainsi les étrangers du Sud du mur. Afin de limiter l’impact budgétaire du mur, le prestataire ayant remporté l’appel d’offre a fait appel à des Pictes du Nord pour le construire. Bref, c’est une réussite totale dont devrait s’inspirer l’agence européenne chargée de la surveillance des frontières, Frontex.

Concluons avec cette citation de Lévi-Strauss :  » le barbare, c’est d’abord l’homme qui croit à la barbarie « . Aucune idée de ce que cela veut dire mais ça pète bien.

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